Chansons
Ici, la plupart des chansons que j'ai écrites ces quinze dernières années, ainsi que les personnes et projets auxquelles elles se rattachent.
L'OBSTINÉE
Elle frappe le sol, frappe le sol
Tourne sur elle, tourne
La pluie inonde ses cheveux
La pluie imbibe sa robe bleue
Lourde est sa tête
Lourde est la robe
Elle frappe le sol, frappe le sol
Tourne sur elle, encore
Le vent renverse son corps fin
Le vent arrache sa robe de lin
Tombe son corps
Tombe la robe
Elle frappe le sol, frappe le sol
Tourne sur elle, encore
La neige fige son tressage
La neige glace son corsage
Dure est sa tête
Dur est son coeur
Elle frappe plus fort, frappe plus fort
Tourne sur elle, encore
Frappe fort, frappe fort
Tourne sur elle, tourne sur elle
Sourde, obstinée
D’étranges ailes
Lui ont poussé
Des ailerons de fer
Elle ne touche plus terre
La neige, le vent, la pluie
S’accordent à dire depuis
La neige, le vent, la pluie
S’accordent à dire ceci :
"Elle perd pied"
2020
Écrite pendant le confinement dans le cadre des compilations du DREIECK INTERFERENCES, c'est la première chanson du duo AUBE. "S'obstine à muter" s'intitule maintenant "L'obstinée" et paraîtra prochainement dans le premier album du duo, "Révolution silencieuse".
LARMES
Guerrières, aux abords des paupières,
Vous éclatez dans l'air
Ce que j'essaie de taire
Indociles, à la pointe des cils,
Vous livrez, immobiles,
Ce qui me rend fébrile
Mesdames, les larmes
Ne seriez vous pas les armes
De l'âme
Bienfaitrices qui du fond de l'iris
Jusqu'à la joue se glissent,
Apaisent mes cicatrices
Aux pupilles, elles s'accrochent et m'habillent
De ce voile qui brille
Quand trop de joie me vrille
Emissaires, de ce vaste mystère
Qui se loge et s'agrippe,
À ma peau, dans mes tripes
Mesdames, que faites-vous là ?
Je ne vous attendais pas.
Mesdames, les larmes
Quand vous m'aveuglez,
Mes armes
Se fanent
2017
Chantée avec JEANNEMARIE, album "Ma peau".
NOYADE
Je ne vous vois plus
Je vous sais là-haut
Au dessus de l'eau
J'ai plongé trop bas
Ce toboggan là
Est trop grand pour moi
Je suis bien ici
Je vois mes cheveux
Voler dans le bleu
Les bruits de la vie sont bien doux par ici
Je les entends au loin
Comme dans un coussin
Si je restais là ?
C'est dangereux je crois
Je ne devrais pas
Tu m'as sorti de l'eau
Douce blessure
2017
Chantée avec JEANNEMARIE, album "Ma peau".
ROSE D'EQUATEUR
Une rose d'équateur
Blanche et rouge de couleur
M'invite à penser
Que notre amour est fatigué
Le rouge passion
S'est retiré au bord
Laissant au blanc le sort
De nos relations
Le temps nous a lavé
Des accrocs, des querelles,
Endormant notre fiel
Blanchissant nos baisers
Une rose d'équateur
Blanche et rouge de couleur
Finit de sécher
Dans le soliflore de l'entrée
Le liseré carmin
De la fleur inodore
Embellit les dehors
De nos coeurs concubins
Mais où sont dont nos belles
Batailles et nos béguins ?
Nous avons choisi l'in -
Différence mutuelle
Ô tu sais, j'ai un peu peur,
De ne plus verser ni pleurs,
Ni larmes, ni sanglots
Sur notre étrange scénario
La rose équatorienne,
Et notre amour polaire,
Nous lancent des lumières,
Pour qu'on se dise : « je t'aime »
Il faut nous empresser
De l'inonder de flammes
Cet endroit de nos âmes
Où les mots sont glacés
Mon amour, si nous plantions
Un rosier vermillon
Ardent, insolent,
Renversant et courtisan
(...)
Pétrissant nos carcans
Ravivant nos élans d'antan,
Un rosier enamourant.
2017
Chantée avec JEANNEMARIE.
Ô DEAR
Ô dear
Where are you?
I'm looking for you
In this kind of desert
I'm allone
With you in my heart
Ô dear
I'm looking for you
Été 2015
Chantée à France Musique dans l'émission "Ocora couleurs du Monde" et avec le CHOEUR SAUVAGE.
PAPILLONS SOTS
Îlot d’air sur l’eau
Sur lequel amers
Des papillons sots
Volent à l’envers
Ils ont vu dans l’eau
Des papillons beaux
Qui le nez en l’air
Volent en arrière
Qui es tu toi
Qui voles là
Je te connais déjà (...)
Qui es tu toi
Moi je suis là
Pour toi
Les papillons sots
Amoureux des beaux
Papillons qui dans
L’eau restent distants
Viens tu pas mon frère
Voler dans les airs
De là haut la terre
N’est pas ordinaire
La vie d’éphémère
Trop courte mon frère
Pour que solitaire
En l’air, je m’enterre
Reste là, j’arrive
Plonge vers ta rive
Papillon marin
Soyons concubin
2014
Chantée avec AUDITIVE CONNECTION (2015) et le CHOEUR SAUVAGE (2019).
MÈRE
De ses bras froids et calmes, la mer m’enveloppe.
Nous sommes seules, deux mères sous le ciel vide.
Au fond de mon ventre,
La douceur infinie se déplie lentement,
Se déplie lentement.
Je marche vers cette ligne, où la mer et le ciel,
Se caressent, se touchent, s’embrassent et se couchent.
Je ne suis pas seule, je suis maman,
Je suis dans la mer, seule, maman.
Là bas, au loin, tu joues, sur la longue plage blanche.
Tu es petite, si petite, magnifique.
Tout ton être s’est coulé quelque part dans mon corps
Et je sais, je sais, qu’il ne me quittera jamais.
Je suis une femme dans l’eau,
Une mère à la mer.
Je ne suis pas seule, je suis maman.
Soudain, je veux partir, très loin, vers cette ligne,
Fouler le sable lourd, sans toi, sans vous, mes amours.
Par delà ce baiser du ciel et de la mer,
Je veux goûter au monde, seule, sans mère.
Je suis une femme dans l’eau, une mère à la mer,
Je suis femme, maman solitaire.
Été 2010
Chantée avec JEANNEMARIE, album "Ma peau".
PETITE FILLE
Petite fille immobile
Regarde les oiseaux jouer
Se bousculer autour des flaques noires
Agiter leurs plumes cendrées
Plonger le bec et boire
Et enfin s'envoler
Petite fille au chapeau
Regarde les oiseaux chanter
Se délecter sous le soleil brûlant
Ouvrir grand leurs ailes mouillées
Montrer leur ventre au vent
Et enfin s'envoler
Et les gens avancent dans la rue en transe
Personne ne voit que la fille aux oiseaux
Rêve en ce moment de s'envoler tout là-haut
Et les gens avancent dans la rue en transe
Personne ne voit que la fille au chapeau
Rêve maintenant de devenir un oiseau
Petite fille aux oiseaux dépose son chapeau sur l'eau
« Petit moineaux, voici votre bateau
Vous pourrez voguer sur la terre, imaginer la mer
Ou m'enm'ner dans les airs »
Et les gens avancent dans la rue en transe
Personne ne voit que la fille sans chapeau
Flotte tout là-haut à bord d'un étrange bateau
2011
À mon père
Écrite sur une musique
de Roland Barbieri
Chantée avec BELETTES, EP "Chansons polyzyglottes".
BLANCHE LUNE
Blanche lune s'éveille
Sur le drap noir de l'eau
Tournent les cygnes gris
Et les ondes longues disparaissent sans bruit
Sur son reflet d'argent
Danse doucement le vent
Tournent les feuilles brunes
Que le froid endort dans le creux de ses bras
Mes yeux s'arrêtent dans ce paysage
Bercés par le grand silence
Tant de beauté enchante mes sens
Je souris inlassablement
Blanche lune est partie
Le drap de l'eau
Doucement s'éclaircit
Tournent tout autours
Le chant des oiseaux
Je crois que le soleil est là
2006
Écrite sur "Monk's mood"
de Thelonious Monk
Chantée avec Agathe Vitteau et Cédric Lemaire (2007) et avec BELETTES (2016).
OISIVETÉ
Faire, faire, faire (…)
Tu t’affaires à faire (…)
Allez viens
On va contempler
Dans les fleurs du pommier
Dans le rayon chaud du soleil brûlé
Dans les battements d’ailes des oiseaux enamourés
On va se lover
Allez viens
On va savourer
Dans les voix légères de nos voisins attablés
Dans l’éclat de rire de nos enfants électrisés
Dans le parfum suave de nos peaux musquées
On va se lover
On sera peut-être plus grands, dedans,
À embrasser les heures du printemps
Plutôt qu’en se rassurant
De ne pas être fainéants
2020
Écrite pendant le confinement et interprétée en solo (voix, harmonium, looper) dans le cadre des compilations du DREIECK INTERFERENCES.
TRAMWAY
Toi, qui me regardes là
Petit être qui ne parle pas
Tu me cloues à la vie
Je n’ai pas le choix
Dans ce tramway
Dense de corps
Qui ne dansent pas
Les yeux éteints
Rivés sur les écrans
Arrimés à nos mains
Ici, les grandes personnes
Ne se regardent pas
Dans les yeux
Ça pourrait être dangereux
Toi, qui me regarde là
Petit fille que je ne connais pas
Tu me cloues à la vie
Je n’ai pas le choix
Dans tes yeux
Toutes les langues du monde
Aucun mot n’est encore sorti de ta voix
Aucun n’est sali, aucun n’est roi
Je descends ici, merci
Silencieusement
Tu m’as tant raconté
Merci
2018
Chantée dans le duo ALLTAG, "Tramway" paraîtra prochainement dans leur premier album intitulé "Chute libre".
EMILY
À la fenêtre de ta chambre,
À la fenêtre de ton cœur,
Tu vois l'aurore qui blanchit,
La nuit qui tombe sur les fleurs,
Tu vois la mort, tu vois la vie.
Parfois si peu de mots,
Joyeux, intransigeants,
Comme ceux d'un enfant,
S'épinglent sur tes pages.
Ils sont des papillons qui portent tout légers,
La journée qui avance, le poids de l'existence.
À la fenêtre de ta chambre,
À la fenêtre de ton cœur,
Tu vois des visages qui rient,
D'autres qui retiennent leurs pleurs,
Tu vois la mort, tu vois la vie.
Tu écris de si loin,
Dans cette langue que
Je comprends tellement peu,
Mille huit cents poèmes.
Messagers d'invisible, ils percent les remparts,
Inondent mon esprit d'éclats de paradis.
Quand les petits riens prennent trop de place,
Que tournent les heures , privées de saveur.
Quand les mots s'habillent pour sauver la face,
Que les confidences restent en silence.
Quand le monde comme une grande machine,
Pour de vaines choses s'agite et s'échine.
Tes mots jaillissent en cadeau,
Merci Emily.
Ta folie, je la lis,
Et ça cogne et ça vit là-dedans
Merci, Dickinson.
2017
À Emily Dickinson
Chantée avec JEANNEMARIE, album "Ma peau".
PERLES DE GOUTTES
Perles de gouttes, sur le carreau
Tracent des routes, des sillons d'eau
Perles de gouttes , sur le carreau
Sèment le doute et brouillent le tableau
A l'arrière des voitures, petites créatures
Le nez sur la vitre, donnent des titres
Aux peintures sauvages que le ciel offre alors
Mélangeant les nuages et les météores
A l'avant des bolides les adultes solides
Allument la radio, c'est les infos
Ils reçoivent en silence les nouvelles des ondes
Les états d'urgence, l'écroulement du monde
Les petits se concentrent sur les culs et les ventres
De ces maisons sur roues aux habitant flous
Et ils comptent sans relâche les yeux jaunes et rouges
Qui s'allument et se cachent sur l'écran qui bouge
Au son de la démence qui jaillit des fréquences
Se mélangent les questions,
S'entrechoquent les où va-t-on
Les adultes, les petits, s'interrogent sur l'endroit
Vers lequel, dans la nuit,
Nous roulons tous, tout droit
Tout le monde ralentit, sur le côté,
Une auto sous la pluie, accidentée.
Perles de gouttes, sur le carreau
Se figent toutes, gronde la radio
Perles de gouttes, les enfants voient
Une âme en déroute s'échapper d'un toit
2017
Chantée dans le duo JEANNEMARIE, album "Ma peau".
MA PEAU
Cela fait si longtemps, mon corps
Que je ne t'ai pas fait danser
Cela fait si longtemps, mon corps
Je t'ai délaissé
Cela fait si longtemps, mon corps
Que te voilà engoncé
Cela fait si longtemps,
Je vais te délasser
Ma peau, pleure
Tout ce que tu n'as pas pu crier
Ma peau,
Laisse donc couler tes larmes enragées
Ma peau, pleure
Tout ce que tu n'as pas su chanter
Ma peau,
Laisse donc briller tes larmes de gaieté
Rendez-moi ma peau animale
Rendez-moi mon scandale
Ma tête, crache
Tout ces mots qui t'ont paralysée
Ma tête,
Laisse donc filer les animosités
Ma tête, crache
Tous ces mots
Qui te font tant vibrer
Ma tête, laisse donc sonner
Tes plus belles pensées
Comme une louve in love,
Je hurle à la nuit
Comme une louve in love,
Je hurle à la vie
Mes hanches, mes hanches,
Venez donc bercer
Ce qui, dans mon ventre,
Est trop agité
Mes hanches, mes hanches,
Venez donc calmer
Ce qui, dans mon ventre,
Vient m’accaparer
Mes louveteaux fantômes,
Le loup de mon lit,
C’est ici, que palpite ma vie
Mes louveteaux fantômes
Le loup de mon lit,
Parfois dans ce nid,
Point de répit
Musique de nuit,
Lave les pores de ma peau,
Délivre moi de mes maux,
En toi, je m’oublie
2016
Chantée avec JEANNEMARIE, album "Ma peau".
INSOMNIE
Ne cesse cette mélodie
Ces mots qui s'invitent sans merci
Nous torpillent sans un bruit
Ne cesse cette tournerie
Valse des soucis
Qui sans répit écarquille nos pupilles
Nous réinventons alors nos vies
Deux cent fois par nuit
Illusion, émotion, évasion
Fantasmons
Tentons de résoudre l'infini
Dans nos dysomnies
Division, précision, solution
Gambergeons
Un somme qui
En somme
Ne sonne
Personne
Un somme
Insomnie
Ne cesse ce charivari
Ce fourbi d'ennuis de pacotille
Qui nous fiche le tournis
Ne cesse cette litanie
Toutes ces broutilles
Qui dans nos lits nous retournent et nous vrillent
A vrai dire la narcolepsie
Nous fait plus envie
Roupillon, abandon, inaction
Somnolons
Arrêtons de boire des camomilles
Prenons des pastilles
Normison, mogadon, nuctalon
Et dormons !
J'ai pas fait ceci
J'ai pas fait cela
Si j'avais fait ci
Si j'avais fait ça
Je me sens coupable
J'en suis pas capable
Pourquoi j'ai dit oui
Et de tout' façons
Je dis jamais non
C'est un' maladie
Qui pendant que je me le dis
Je ne dors pas la nuit
2016
Écrite sur une musique
de Roland Barbieri
Chantée avec JEANNEMARIE, album "Ma peau".
MOSAÏQUE
A l'ombre du cerisier en fleur
Une odeur de jasmin
Volée par le vent
Le chat qui dort sur cette pierre
Elle se sent bien
Sous ses paupières clauses
Un rayon de soleil
Frappe le coin secret d'une toile très ancienne
Dévoilant une fresque, un Vermeer, une mer, un ange clair
Un petit bout de monde
Qu'elle attrape du bout des doigts
Elle rassemble ces petits bouts de monde
En mosaïque ronde
Les fait tourner dans ses yeux
Pour le voir autrement
Notre monde
Sous la voûte d'une église dorée
Au dehors l'été cogne sur les fontaines de Rome
Sous les pierres, les chats se sont cachés
Elle se sent bien
Sa main posée sur le pied d'un géant de marbre
Sous les pétales bleues d'une rose en vitrail
Elle entend une antienne grégorienne, quelques bribes italiennes
Des petits bouts de monde
Qu'elle attrape du bout des doigts
Elle rassemble ces petits bouts de monde
En mosaïque ronde
Les fait tourner dans sa tête
Pour l'entendre autrement
Notre monde
Sous un ciel de vingt-deux novembre
Les violons de Verlaine
Font danser les feuilles rousses
Sous la couette de plumes le chat dort
Elle se sent bien
Fellini à l'écran et le vin qui pétille
Un tango endiablant, en secret ils se marient
Et se lisent, du Baudelaire, du Flaubert, de la théologie,
Des petits bouts de monde
Qu'elle attrape du bout des doigts
Elle rassemble ces petits bouts de monde
En mosaïque ronde
Les fait tourner dans son coeur
Pour l'aimer autrement
Notre monde
Dans la maison chaude et silencieuse
Au dehors, le jardin, sous la neige disparaît
Devant le feu le chat ferme les yeux
Elle se sent bien
Un vinyle à la rose, elle choisit Barbara
À mourir pour mourir pour accompagner ses doigts
Elle découpe des papiers colorés, des cartons à boutons
Des petits bouts de monde
Qu'elle attrape du bout des doigts
Elle rassemble ces petits bouts de monde, en mosaïque ronde
Les fait tourner dans ses mains
Pour le prendre autrement
Notre monde
Aujourd'hui, les saisons ont passé et filent encore
Pendant que le chat dort
On te souhaite bien des trésors
Des petits bouts de monde
Pour ta mosaïque ronde
2012
À ma mère
Chantée avec BELETTES, EP "Chansons polyzyglottes"